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Renforcement de la réglementation des plateformes de crowdfunding dans le cadre de la lutte contre le blanchiment et le financement du terrorisme

Renforcement de la réglementation des plateformes de crowdfunding dans le cadre de la lutte contre le blanchiment et le financement du terrorisme

La publication de l’ordonnance du 1er décembre 2016, qui impose aux plateformes de dons d'être désormais immatriculées auprès de l’ORIAS en tant que IFP (intermédiaire en financement participatif), est l’occasion pour faire un point, certes non exhaustif sur ce sujet important que constitue la lutte contre le blanchiment et le financement du terrorisme.

La lutte contre le blanchiment et le financement du terrorisme (LCB-FT) est un enjeu sociétal majeur qui se traduit par l’obligation de respecter la réglementation en matière de connaissance des clients. Le dispositif exigé par le régulateur repose sur une obligation de vigilance et de contrôle du risque (LCB-FT) dès l’entrée en relation. En substance une plateforme de crowdfunding devrait être en mesure de prendre une décision quant à l’entrée en relation ou le maintien d’une relation d’affaires existante.


Disposer du statut de IFP, pour un opérateur de plateforme de financement participatif n’est pas juste une contrainte, c'est :


  • Une reconnaissance officielle d’un organisme d’Etat et l’autorisation d’arborer fièrement un beau macaron !
  • Une sécurité pour les plateformes car même si tout risque n’est pas écarté, mieux vaut quelques « garde-fous » que rien du tout.
  • Un argument commercial propre à rassurer a minima clients.

La vigilance de la plateforme doit reposer alors sur une approche par les risques basée sur des critères permettant d’identifier le niveau de risque présenté par les relations d’affaires et d’adapter en conséquence le niveau de vigilance. Ainsi, la collecte de pièces justificatives (carte d’identité, justificatif de domicile, statuts) appelée souvent KYC (Know Your Customer) ne doit pas être considérée uniquement comme une « simple » collecte administrative, mais comme un processus d’évaluation du profil de risque de la clientèle permettant d’adapter le niveau de vigilance.


Les dispositions visent à respecter l’ensemble des lois et des règlements en matière de lutte contre le blanchiment et le terrorisme sont pour mémoire ou pour information :


  • le Code Monétaire et Financier (articles L.561-1 et suivants et articles R.561-1 et suivants) ;
  • l’arrêté du 2 septembre 2009 pris en application de l’article R.561-12 du Code Monétaire et Financier définissant les éléments d’information liés à la connaissance du client et de la relation d’affaires aux fins d’évaluation des risques de blanchiments des capitaux et de financement du terrorisme ;
  • l’arrêté du 3 novembre 2014 relatif au contrôle interne des entreprises du secteur de la banque, des services de paiement et des services d’investissement soumis au contrôle de l’ACPR;
  • l’ordonnance du 1er décembre 2016 visant à renforcer les obligations en terme de (LCB-FT)

Focus sur une première série de bonnes pratiques voire d’exigences réglementaires en matière de lutte contre le financement du terrorisme :


Au sein de la plateforme, un correspondant et déclarant TRACFIN (Article R561-23 et R561-24 du Code Monétaire et Financier) doit être clairement identifié. Une procédure de lutte contre le blanchiment doit être établie, formalisée, connue, comprise et admise par tous les collaborateurs de la plateforme : tous les adjectifs comptent ! Un contrôle en matière de LAB-FT doit être assuré en particulier s’agissant d’accepter un nouveau projet. Des « fiches d’incident » et de retour d’expérience doivent être établies à des fins d’amélioration du dispositif


Rappelons que la notion de relations d’affaires est codifiée en droit français à l’article L.561-2-1 du Code Monétaire et Financier. L’article dispose qu’« une relation d'affaires » est nouée lorsqu'une personne mentionnée à l'article L. 561-2 engage une relation professionnelle ou commerciale qui est censée, au moment où le contact est établi, s'inscrire dans une certaine durée.


La notion de « relation d’affaires » est plus large que la notion de « client » puisqu’elle englobe les « relations professionnelles ou commerciales » qui s’inscrivent dans la « durée ». Cela signifie que les clients, les apporteurs d’affaires, les garants et les partenaires financiers constituent des relations d’affaires de la plateforme.


La législation impose d’identifier le « bénéficiaire effectif » lorsque le client est une personne morale.


On entend par « bénéficiaire effectif » la ou les personnes qui :


  • détiennent, directement ou indirectement, 25% ou plus du capital ou des droits de vote de la société ;
  • exercent, par tout autre moyen, un pouvoir de contrôle sur les organes de gestion, d’administration ou de direction de la société ou sur l’assemblée générale de ses associés.

L’identification de ce bénéficiaire effectif peut imposer de remonter la chaîne d’actionnariat jusqu’à la (aux) personne(s) physique(s) et éventuellement de prendre en compte le pourcentage global de détention par personne afin de vérifier si le tiers concerné entre dans la définition ci-dessus.


L’obligation d’identification du client, et le cas échéant du bénéficiaire effectif doit être préalable à l’entrée en relation. Aucune campagne ne peut être lancée des campagnes sans que les clients utilisateurs de la de la plateforme se soient conformés aux règles de KYC et que leur profil ait été dûment validé le plus souvent par l’établissement de paiement avec lesquelles elle travaille.


Les obligations de vigilance sont étroitement liées à l’évaluation du niveau de risque du client.


Pour la majorité des clients, la plateforme appliquera un niveau de vigilance “constant”; pour les autres clients, la société appliquera un niveau de vigilance “élevé” lequel consistera à obtenir des informations complémentaires sur les dossiers à risque “élevé”.


Les opérations considérées comme suspectes sont susceptibles d’être déclarées à TRACFIN. Le soupçon peut concerner des activités visant à financer le terrorisme, le financement de la prolifération nucléaire, le trafic d’êtres humaines, le trafic de stupéfiants, la corruption et le trafic d’influence, l’abus de biens sociaux, la contrefaçon, l’escroquerie, l’abus de confiance, l’abus frauduleux de l’état d’ignorance ou de la situation de faiblesse, le travail dissimulé ou dans certaines conditions la fraude fiscale. La société n’est pas tenue à préciser ou qualifier l’infraction sous-jacente. Dès lors qu’une opération a été déclarée comme suspecte, il est opportun d’examiner les autres opérations du client.



Deuxième série de bonnes pratiques voire d’exigences réglementaires


Ces régles peuvent sembler évidentes, mais cela ne fait pas de mal de les rappeler :


  • Aucun collaborateur de la plateforme, ne doit prendre part à une opération de blanchiment, de Financement du Terrorisme personnellement ou dans le cadre de ses fonctions.
  • Tout collaborateur s'oblige à lire, à comprendre et à accepter de se soumettre à une politique de lutte contre le blanchiment. S’il ne comprend pas un point de cette politique, il doit en demander l’explication !
  • Tout collaborateur est tenu d’assister et/ou de réaliser les formations proposées en matière de Lutte Contre le Blanchiment et le financement du terrorisme. Ces formations sont obligatoires au moins une fois par an.
  • Tous les collaborateurs doivent conserver confidentielles les informations sur les déclarations de soupçons et les enquêtes de TRACFIN spécialement vis-à-vis du client.
  • Tous les collaborateurs doivent s’abstenir de prendre part, personnellement ou au travers de leur fonction à des faits de corruption passive ou active. Ils doivent dénoncer ces faits.
  • Le dirigeant d’une plateforme s’engage à protéger ses collaborateurs dénonçant les infractions aux lois et règlements.
  • Tout employé déclarant de bonne fois toute mauvaise pratique sera protégé pourvu que les faits soient avérés.